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un drame en livonie.

Kroff avait servi sur la table du pain, du lard froid et la tasse pour le thé. Puis, s’adressant au voyageur :

« Et vous, monsieur ?…

— Je n’ai pas faim, répondit celui-ci. Indiquez-moi ma chambre… J’ai hâte de me coucher, car il est probable que je n’attendrai pas le retour du conducteur… Je quitterai l’auberge demain dès quatre heures…

— Comme il vous plaira », répondit le cabaretier.

Et il conduisit le voyageur à la chambre qui occupait l’extrémité de la maison, à gauche de la grande salle, réservant au garçon de banque celle qui se trouvait à droite.

Mais, tandis que l’inconnu parlait, son capuchon s’étant légèrement dérangé, le brigadier, qui l’observait, avait pu apercevoir en partie son visage. Cela lui suffit.

« Oui, murmura-t-il, c’est bien lui… Tiens, pourquoi veut-il partir de si bonne heure, et sans reprendre la malle ?… »

De fait, les circonstances les plus naturelles paraissent toujours singulières à ces gens de police !

« Et où va-t-il ainsi ?… » se demanda Eck, questions auxquelles le voyageur n’aurait certainement pas répondu si elles lui eussent été faites. Du reste, celui-ci ne parut pas s’apercevoir que le brigadier l’eût examiné avec une certaine insistance et reconnu. Il entra donc dans la chambre que lui indiqua Kroff. Eck revint près de Poch, qui mangeait de bon appétit.

« Ce voyageur était avec vous dans la malle ?… lui demanda-t-il.

— Oui… monsieur Eck, et je n’ai pas pu en tirer quatre paroles…

— Et vous ne savez pas où il va ?…

— Non… il est monté dans la voiture à Riga, et je pense qu’il se rendait à Revel. Si Broks était là, il pourrait vous renseigner.