— Oh ! cela n’en vaut pas la peine », répondit le brigadier.
Kroff écoutait cette conversation de cet air d’aubergiste indifférent qui ne tient guère à savoir quels sont ses hôtes. Il allait et venait dans la salle, tandis que paysans et bûcherons prenaient congé en lui souhaitant le bonsoir.
Cependant le brigadier, qui ne se pressait plus de partir, s’amusait à faire causer ce bavard de Poch, lequel ne demandait pas mieux, d’ailleurs.
« Et vous allez à Pernau ?… dit-il.
— Non… à Revel, monsieur Eck.
— Pour le compte de M. Johausen ?…
— Pour son compte », répondit Poch.
Et, d’un mouvement instinctif, il rapprocha de lui le portefeuille déposé sur la table.
« Voilà un accident de voiture qui vous causera au moins douze heures de retard…
— Douze heures seulement, si Broks revient demain matin comme il l’a promis, et je serai de retour à Riga dans quatre jours… pour le mariage…
— Avec la bonne Zénaïde Parensof !… Oh ! je sais…
— Je le crois bien… vous savez tout !
— Non, puisque je ne sais pas où va votre compagnon de voyage… Après tout, s’il part demain matin de si bonne heure et sans vous attendre, c’est sans doute parce qu’il s’arrête à Pernau…
— C’est probable, répondit Poch, et, si nous ne nous revoyons pas, bon voyage ! – Mais dites-moi, monsieur Eck, est-ce que vous passez la nuit dans cette auberge ?…
— Non, Poch, nous avons rendez-vous à Pernau et nous partons à l’instant… Quant à vous, après un bon souper, tâchez de dormir d’un bon somme… et ne laissez pas traîner votre portefeuille…