Aller au contenu

Page:Verne - Voyages et aventures du capitaine Hatteras.djvu/279

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
269
LE DÉSERT DE GLACE

il s’approcha du poêle et le trouva complètement éteint ; les occupations de la matinée, les émotions mêmes, avaient fait oublier à Johnson ce soin dont il était habituellement chargé.

Le docteur se mit en devoir de rallumer le feu, mais il ne rencontra pas une seule étincelle parmi les cendres déjà refroidies.

« Allons, un peu de patience ! » se dit-il.

Il revint au traîneau chercher de l’amadou, et demanda son briquet à Johnson.

« Le poêle est éteint, lui dit-il.

— C’est de ma faute, » répondit Johnson.

Et il chercha son briquet dans la poche où il avait l’habitude de le serrer ; il fut surpris de ne pas l’y trouver.

Il tâta ses autres poches, sans plus de succès ; il rentra dans la maison de neige, retourna en tous sens la couverture sur laquelle il avait passé la nuit, et ne fut pas plus heureux.

« Eh bien ? » lui criait le docteur.

Johnson revint et regarda ses compagnons.

« Le briquet, ne l’avez-vous pas, monsieur Clawbonny ? dit-il.

— Non. Johnson.

— Ni vous, capitaine ?

— Non, répondit Hatteras.

— Il a toujours été en votre possession, reprit le docteur.

— Eh bien ! je ne l’ai plus… murmura le vieux marin en pâlissant.

— Plus ! » s’écria le docteur, qui ne put s’empêcher de tressaillir.

Il n’existait pas d’autre briquet, et cette perte pouvait amener des conséquences terribles.

« Cherchez bien, Johnson, » dit le docteur.

Celui-ci courut vers le glaçon derrière lequel il avait guetté l’ours, puis au lieu même du combat où il l’avait dépecé ; mais il ne trouva rien. Il revint désespéré. Hatteras le regarda sans lui faire un seul reproche.

« Cela est grave, dit-il au docteur.

— Oui, répondit ce dernier.

— Nous n’avons pas même un instrument, une lunette dont nous puissions enlever la lentille pour nous procurer du feu.

— Je le sais, répondit le docteur, et cela est malheureux, car les rayons du soleil auraient eu assez de force pour allumer de l’amadou.

— Eh bien, répondit Hatteras, il faut apaiser notre faim avec cette viande crue ; puis nous reprendrons notre marche, et nous tâcherons d’arriver au navire.