— Et peut-on le voir, ce jeune conscrit ? demanda-t-il.
Pendant que la grand’mère prenait le bébé, Maurice Bournef, penché vers sa femme, mettait un baiser sur ses cheveux.
— Chère Jeanne !
— Maurice !
Tout l’amour de ces deux êtres tenait dans ces deux noms échangés.
— Voilà notre Pierre ! dit Mme Delmas, en présentant le nouveau-né à son mari.
— Mâtin ! est-il beau, le gaillard. Et il n’a que trois jours ! On lui donnerait trois mois.
Se baissant sur le petit front rouge, le général y posa ses lèvres.
— Bonjour, beau Saint-Cyrien ! dit-il.
— Oh, protesta Jeanne.
— Eh bien quoi, fit plaisamment le général, mon pronostic n’est pas une offense, je pense. Bon sang ne peut mentir et j’espère bien que le petit-fils du général Delmas ne fera pas rougir son grand-père.
— Je ne désire pas que mon fils soit soldat, dit Jeanne pensive.
Maurice Bournef serra tendrement la main de sa femme.
— Nous avons bien le temps de penser à l’avenir, dit-il.
— Qu’il grandisse d’abord, reprit Mme Delmas en apportant l’enfant à sa mère. Et pour commencer nous allons prier le général d’aller fumer un cigare dans le jardin, pendant que notre petit homme prendra sa tétée.
— Compris ! dit Maurice. Descendons au jardin, Général.
— Je vous suis, mon gendre.
Le général Delmas, une de nos gloires coloniales,