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LA NOUVELLE ÉQUIPE

— Il faut qu’ils le jugent, déclara-t-il ; nous voulons le grand jour. Qu’ils se prononcent et que nous puissions les confondre.

Mais l’alerte avait été donnée. Les grands chefs avaient senti le danger. Une campagne d’opinion sur un élève de Normale, futur professeur de l’Université, cela pouvait devenir scabreux. Des ordres secrets furent adressés à qui de droit. Brusquement, Roger Bournef fut appelé devant le conseil de réforme, et réformé. En février, il revenait dans sa famille.

— Par exemple, déclara Didier, ça c’est un bon tour.

— Et admirez le motif de ma libération, dit Roger ; je suis réformé pour inaptitude morale au service militaire.

— Sans blague ?

— Mais oui. C’est mot à mot le motif de réforme.

Didier eut un bon rire.

— Eh bien, mon cher ami, nous n’avons quand même perdu ni notre temps, ni nos efforts. Cette inaptitude morale, c’est une perle. Nous allons la sertir pour notre prochain numéro.

Jean Tissier à son tour, fut pris de gaieté.

— Pour la jeter aux pourceaux, dit-il.

— Nullement, mon cher. Ce sont les pourceaux qui nous la fournissent, peut-être ; mais c’est pour la soumettre aux braves gens que nous allons lui donner tout l’éclat qu’elle mérite.

La gaieté se fit générale.

— C’est égal, conclut Didier, « inaptitude morale au service militaire » ! Si après ça on laisse encore des objecteurs de conscience en prison, la partie sera belle pour la Ligue des Droits de l’Homme.


L’acte de Roger Bournef avait été porté à la connaissance du Général Delmas par un journal d’Officiers. On devine comment il en avait été ému, Roger Bour-