Aller au contenu

Page:Vernet - La nouvelle équipe, 1930.pdf/53

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
47
LA NOUVELLE ÉQUIPE

Bourdeau éclata.

— Qui vous dit qu’on n’y a pas pensé, Madame Bournef. Ah ! je vous jure que pour ma part, si je n’avais pas les trois mioches…

— Eh bien ?

— Eh bien, je ne partirais pas.

— Mais en partant vous les abandonnez, voyons ?

— Écoutez, je suis placé entre deux alternatives : partir et être tué peut-être, ne pas partir et être tué sûrement. Entre les deux risques je choisis celui qui laisse encore un espoir à ma famille.

Puis, comme tous se taisaient :

— Mais je vous jure, Madame Bournef, que si je pouvais choisir, j’aimerais mieux risquer les douze balles du peloton d’exécution.

Dans la rude voix mâle, il y avait eu la félure d’un sanglot retenu.

— Je vous crois, mon ami, dit Jeanne en tendant simplement la main à Jacques Bourdeau.

— Et voilà comme nous sommes tous, conclut toujours aussi amèrement Marcel Lenoir. Après cela on dira que le peuple Français est un peuple libre.


VI


Il avait été entendu que le lendemain, dimanche, Louise et Léon partiraient de très bonne heure. Léon devait se rendre à la C. G. T. Louise voulait essayer de voir son frère, lequel, sous-officier de réserve, devait certainement partir dans les premiers jours.

Eugène Royer habitait Champigny avec sa femme et ses deux enfants. Mais la mère de sa femme habitait Paris, et Louise pensait qu’en se rendant chez cette dernière, elle serait exactement renseignée.