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LA NOUVELLE ÉQUIPE

de mon pays, comprends-tu ? de mon pays. Je ne puis pourtant pas le laisser envahir.

— Mais qui le menace ?

— Justement, je ne vois pas la menace. Où est-elle ? L’Allemagne et la France, depuis quelques années, s’étaient beaucoup rapprochées. Et sans cette misérable affaire de l’Autriche et de la Serbie, l’avenir était proche, peut-être, où les deux peuples se seraient réconciliés. Y a-t-il donc, dans l’ombre, des forces intéressées à la rivalité de ces deux nations ? Ce qui est le plus terrible vois-tu, c’est de ne rien savoir…

Puis avec douleur :

— Donner sa vie, ce n’est rien, quand on la donne pour une grande cause ; mais devoir la donner sans savoir pourquoi, et qui sait même, pour couvrir des intrigues de courtisans et des intérêts financiers…

Maurice se tut. Doucement, Jeanne prit sa main, la porta à ses lèvres.

— Maurice dit-elle enfin, si nous partions. Tu dois rejoindre ton frère à trois heures.

— Tu as raison, partons, je ne peux plus vivre ici.

Quand les deux époux arrivèrent à Paris, ils purent constater une animation bien plus fiévreuse que la veille. L’annonce de la déclaration de guerre de l’Allemagne à la Russie venait d’être connue, et les cerveaux, échauffés par l’effervescence patriotique des derniers jours, exultaient. Il semblait que la foule attendait, anxieuse, le dernier acte du drame qui depuis un mois bouleversait l’Europe.

Devant Maurice et Jeanne, trois hommes marchaient en causant avec animation.

— À présent, disait l’un, la partie est commencée. Demain, après-demain, ce sera notre tour.

— Il n’est pas possible d’en douter, dit un autre.

— Aussi bien, répliquait le troisième, il faut en finir. Si les choses s’étaient encore arrangées à l’amiable,