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Page:Verrier - Essai sur les principes de la métrique anglaise, 2e partie, 1909.djvu/208

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ig8 ESTHÉTIQLE DU RYTHME

§ 192. L'Inscription de la corne d'or de Gallehus (v. i> loçy) est le per- mier exemple que nous possédions du vers allitéré. Ensuite viennent les vers attribués à Ctedmon (v. § 162) et ceux de Bède (v. p. lOô, note 2) :

metud.TS moccti end his niodgidanc (i).

C-EDMON (?)

aefter deothdaege doeniid uueorthae (2).

Bède (Ms. de Saint Gall n" 254, du ix* siècle).

L'antiquité de ces vers et leur origine différente montrent que la poésie germanique n'a pas emprunté l'emploi régulier de l'allitération à la litté- rature latine — où ce n'était d'ailleurs qu'une élégance devenue de plus en plus rare — mais qu'elle l'avait adopté avant la séparation des Germains en plusieurs peuples. C'est évidemment leur accentuation initiale qui lesy avait portés, exactement comme les Italiotes et les Celtes. Qu'ils y aient eu recours de très honne heure, nous en avons maintes preuves. Dès le temps de Tacite, comme pour exprimer par là les liens de parenté, les personnes de même famille portaient souvent des noms associés par l'allitération : Segestes, Segimërus, Segimundus, ^sv-.Oav/.:; ; Thusnelda, Thumelicus ; Vannius, Vangio ; Viduarius, Yitrodorus, etc. (3). On peut citer aussi : Inguaeones, Erminones, Istuaeones (/i). Enfin les Germains ont employé de tout temps et en nombre très considérable des locutions allitérées de toute espèce. J'en ai donné quelques exemples pour l'anglais moderne; pour l'allemand moderne, on en trouvera une liste assez longue dans le livre déjà cité de M. Sanders (Deutsche Silbenmessiing, § io3-ii8). Il faut y ajouter la plupart des dictons, proverbes ou maximes. Ainsi l'allitération a con- tinué d'être recherchée par les Germains même après avoir cessé d'être un élément essentiel de leur versification. Elle y fut en effet remplacée par la rime, nous l'avons vu, dès le ix*" siècle au plus tard. La rime s'y est- elle développée spontanément, comme dans la poésie populaire des Latins ?

le sens en deux moitiés (op. SJ 106 et i35). Cette strophe a-t-elle précédé la versification stichi- que chez les autres Germains ? On peut l'admettre, sans toutefois approuver les restitutions de M. Hermann Moller (Das altenfjUsche Volksepos, Kiel, i883 ; Zur althocMeutschen alliterations- poesie, Kiel, 1888). Cp. G. Neckel, Beitrucje zur Eddaforschuiuj, Dortmnnd, 1908, p. 4-21.

(i) En saxon occidental : metodes miehte ond his môdgedonc (Alfred le Grand ?) « polcntiani creatoris et consilium illius » (Bède).

(2) En saxon occidental : œfter dèaddœge dêmed weorde » (qualitcr) post exitum iudicanda fuerit (Cuthbert). — W'idsïS et Bêoivulf sont plus vieux encore que ces poèmes; maison pourrait objecter que nous en possédons seulement des remaniements de date relativement récente.

(3) L'allitération des noms propres ne présente pas ici la même forme que chez les anciens Latins (v. § 187). Elle avait d'ailleurs disparu chez eux longtemps avant qu'ils entrassent en contact avec les Germains. Ceux-ci ne la leur ont donc pas empruntée. Les rapports plus ou moins indirects que les Germains, même ceux du Nord, entretenaient avec l'Italie dès avant la fondation de Rome (v. Montelius, IS'ordisk Tidskrift, iyo8, p. agS et suiv., 383 et suiv.) n'ont pu avoir d'influence sur les noms, les locutions et la versification. Bref, contrairement à l'opi- nion de y[. KaAvczynski (/. c, p. 102 et suiv.), ils ne tiennent pas des Romains l'usage de l'alli- tération.

(4) Sur l'allitération des noms propres, v. iMùllenhofT, Zcltschr. f. d. AU., VII, 527. V. Add.