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LE CLOÎTRE

I


Le cloître dort sa mort aux bords de glauques eaux ;
Ses piliers, ses arceaux, se confondent dans l’onde,
Et quand le bourdon gronde en la nuit très profonde
Seul l’airain élargit son frisson sur les flots.

Tout est noir, tout étouffe, et tout parle de mort :
L’oubli d’ouate molle enveloppe la vie ;
Plus d’amour, plus d’orgueil, plus de haine, d’envie ;
Le cloître assis au bord de l’eau glauque est un port.


II


Silence : la prière. Et — silence : la lune…
Par couples, sourds, les sons parcourent les entours,
Et la lune a bleui la toiture des tours,
Et des frémissements ont pétri la nuit brune.

L’église brusque l’ombre ainsi qu’un blanc fantôme,
Ô mon cœur, je t’avais cru mort, et pour jamais.
Mais me revoici pur, et tel que je m’aimais,
Hors de Gomorrhe, avec sur mes lèvres un psaume.