Page:Vianey - Les Poèmes barbares de Leconte de Lisle, 1933.djvu/153

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on peut imaginer ce qu’elle fut, et, si court qu’il soit, le tableau a une grandeur digne d’un tel peintre :


L’oiseau même, chassé de branche en branche par le flot toujours croissant, fatigue inutilement ses ailes sur des plaines d’eau sans rivages.


Chez Byron, la mort de l’aigle n’est qu’annoncée, mais quelle émotion et quelle puissance !


Quels cris il fera entendre en planant sur la mer impitoyable ! En vain il appellera à lui sa naissante famille, la vague envahissante seule lui répondra ; — c’est vainement aussi que l’homme lui enviera ses larges ailes qui ne le sauveront pas ; — où pourrait-il reposer son vol alors qu’à perte de vue l’espace ne lui offrira que l’Océan, son tombeau ?


Du tableau de Bryon Leconte de Lisle retient le mot tombeau. Il retient surtout qu’il doit montrer, non la chute de l’oiseau, mais ses efforts désespétés. Sa grande connaissance de l’animal lui permet de les représenter avec précision. Mais comme il sait unir à la justesse des détails l’ampleur du cadre !


Hérissés, et trouant l’air épair, en spirale,
De grands oiseaux, claquant du bec, le col pendant,
Lourds de pluie et rompus de peur, et regardant
Les montagnes plonger sous la mer sépulcrale,
Montaient toujours, suivis par l’abîme grondant.


Dans le recueil des Poèmes Barbares, il y a des poèmes qu’on peut préférer à Qaïn et il me semble