Page:Viard - Grandes chroniques de France - Tome 9.djvu/313

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royaume de France. Car les uns avoient robes si courtes qu’il ne leur venoient que aus nasches[1], et quant il se bessoient pour servir i seigneur, il monstroient leurs braies et ce qui estoit dedenz à ceulz qui estoient derriere eulz ; et si estoient si estroites qui leur failloit aide à eulz vestir et au despoillier, et sambloit que l’en les escorchoit quant l’en les despoilloit. Et les autres avoient leurs robes fronciées sus les rains comme femmes ; et si avoient leurs chaperons detrenchiez menuement tout entour ; et si avoient une chauce d’un drap et l’autre d’autre ; et si leur venoient leurs cornetes et leurs manches près de terre et sembloient miex jugleurs que autres gens. Et pour ce, ce ne fu pas merveille se Dieu volt corrigier les excès des François par son flael le roy d’Angleterre.

Après ces choses, se departi le roy Anglois moult joieux de la grant victoire qu’il avoit eue et s’en ala passer Monsterel et Bouloigne[2], et vint jusques à Kalais sur la mer[3]. En ycelle ville de Kalays estoit i vaillant chevalier, de par le roy de France capitaine, lequel avoit à nom messire Jehan de Vienne né de Borgoine[4]. Et pour ce que le roy d’Angleterre ne pot pas si tost entrer en la ville de Kalais comme il voult, il la fist fermer de siege, et si fist eslever habitacions assez

  1. « Aux nasches », aus fesses.
  2. Sur la marche de l’armée anglaise depuis Crécy jusqu’à Calais, voir Jules Viard, Le siège de Calais, dans le Moyen âge, 2e  série, t. XXX (1929), p. 129 à 132.
  3. Édouard III s’établit sous les murs de Calais le 4 septembre 1346 (Ibid., p. 132, note 25).
  4. Jean de Vienne, seigneur de Rothelanges, qu’il ne faut pas confondre avec l’amiral Jean de Vienne, mourut à Paris le 4 août 1351 (P. Anselme, t. VII, p. 806).