Page:Viau - Œuvres complètes, Jannet, 1856, tome 1.djvu/400

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Je sers trop mal-heureusement :
Ma belle ne veut point entendre
Le mal qu’elle me fait sentir,
Et me deffend de rien pretendre
Que la honte et le repentir.

Ô mes Dieux ! ô mon influence !
Regardez la peine où je suis !
Sans faire un crime je ne puis
Esperer une recompense.
Ô Dieux qui gouvernez nos cœurs !
Si vous n’estes des Dieux mocqueurs
Ou des Dieux sans misericorde,
Remettez-moy dans ma maison,
Ou faictes enfin qu’on m’accorde
Ou la mort ou la guerison !



ODE.


Je n’ay repos ny nuict ny jour,
Je brusle, je me meurs d’amour ;
Tout me nuit, personne ne m’ayde ;
Le mal m’oste le jugement,
Et plus je cherche de remede.
Moins je trouve d’allegement.

Je suis desesperé, j’enrage :
Qui me veut consoler m’outrage.
Si je pense à ma guerison,
Je tremble de ceste esperance ;
Je me fasche de ma prison,
Et ne crains que ma delivrance.

Orgueilleuse et belle qu’elle est,
Elle me tue, elle me plaist ;
Ses faveurs, qui me sont si cheres,