NOTICE SUR THÉOPHILE.
es réputations littéraires sont comme les
livres : habent sua fata. Celle de Théophile
fut grande et de longue durée : les
éditions de ses œuvres se succèdent pendant
plus d’un demi-siècle ; il figure parmi
les auteurs designés par l’Académie
pour faire autorité dans la rédaction du Dictionnaire ;
il est opposé, préféré à Malherbe. Ronsard, Malherbe,
Théophile, ces trois noms se trouvent accolés
dans une des premières préfaces de Corneille, qui fait
à Théophile l’honneur d’imiter quelques lignes de sa
prose[1]. Saint-Evremond a l’air de déplorer l’oubli
dans lequel tombe ce poète favori des courtisans du
temps de sa jeunesse ; Boileau, qui l’imite dans un
passage[2], ne l’attaque que sous le rapport de la justesse
et de l’art ; Molière retrouve de son bien dans le fragment
d’une histoire comique ; La Bruyère établit entre
Malherbe et Théophile un parallèle qui est toute une
théorie littéraire. En plein XVIIIe siècle, Voltaire,
s’occupant un jour, avec prédilection, des François accusés
d’avoir mal parlé de la religion, se souvient de
Théophile, et il glisse sur les défauts d’un poète victime