Page:Viau - Œuvres complètes, Jannet, 1856, tome 2.djvu/63

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De faire réussir le bien qu’il m’a prédit,
On verra que Paris n’a point changé de place,
Et que mes sentimens n ont point changé de face.
Or, comme dans la cour j’estois peu courtisan,
Sçache que dans les champs je ne suis point paysan,
Et que mes passions aucunement ne cèdent
A la contagion des lieux qui me possèdent.
Mon sens en toutes parts suivant un mesme cours,
Tu me verras tout tel que tu m’as veu tousjours.
Que si mon long exil doit borner ma demeure.
Quelque part où ce soit, si faut-il que je meure,
Et, quoy que face Ilax et les plus favoris.
Le Ciel n’est pas plus loin d’icy que de Paris.


ODE.

Perfide, je me sens heureux
De ma nouvelle servitude ;
Vous n’avez point d’ingratitude
Qui rebute un cœur amoureux.
Il est bien vray que je me fasche
Du fard où vostre teint se cache ;
Nature a mis tout son crédit
A vous faire entièrement belle ;
L’art qui pense mieux faire qu’elle
Me deplaist et vous enlaidit.
L’esclat, la force et la peinture
De tant et de si belles fleurs.
Que l’aurore avecques ses pleurs
Tire du sein de la nature.
Sans fard et sans déguisement
Nous donne bien plus aisément