Page:Victoire de Donnissan de La Rochejaquelein - Mémoires de Madame la marquise de La Rochejaquelein, 1889.djvu/87

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l’Ancienne-Comédie ; sans le connaître. Ils acceptèrent et furent sauvés par cet excellent homme]. M. de Lescure espéra qu’il pourrait leur avoir des passeports dans notre même section, où ils n’étaient nullement connus ; il fallait trouver un homme prêt à déclarer qu’ils logeaient chez lui, et en outre que ce fût certifié par deux témoins : M. de Lescure se chargea de dire qu’ils habitaient dans sa maison. Il envoya chercher Lirzin, le limonadier dont on avait cassé les vitres le 8 août, lui parla, le décida à servir de témoin et à en amener un autre. MM. de Lescure, de la Rochejaquelein, d’Autichamp et Thomassin, toujours en uniforme, arrivent à la section ; on leur promet des passeports, mais ils sont obligés d’attendre que d’autres personnes soient expédiées.

Pendant ce temps, le second témoin s’avise de lire un papier affiché dans la salle ; il voit que c’est une loi portant deux ans de fers contre les faux témoins pour les certificats de résidence et passeports : il s’approche du secrétaire et dit qu’il se récuse et qu’il ne connaît pas ces messieurs. Outre le danger excessif que cela devait leur faire courir, et à M. de Lescure, il y avait d’autant plus de péril, que cet homme demeurait en face de notre hôtel ; il était donc impossible qu’il ne sût pas si ces messieurs y logeaient ou non. Heureusement le secrétaire était honnête homme, il dit tout bas à M. de Lescure : « Vous êtes tous perdus, sortez. » Il ajouta tout haut de revenir à un autre moment, qu’il n’avait pas le temps de l’expédier, et cela d’un ton de fort mauvaise humeur. Ces messieurs s’évadèrent doucement et se sauvèrent par ce miracle.

Il fut décidé que nous partirions en voiture, le 25 août, pour le Poitou, maman, mon père et moi, tous fort mal mis, avec M. Thomassin en habit d’uniforme, M. de Lescure et un seul domestique en courriers. Nous avions tâché d’avoir un postillon sûr, mais au lieu de cela, on nous en donna un qui était ivre et scélérat ; il pensa causer notre perte. Nous arrivons à la bar-