Page:Victor Alfieri, Mémoires, 1840.djvu/301

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dignation que j’y vois briller à chaque page, et dont l’éclat n’ôte rien à une sorte de franche et véhémente logique qui me paraît y dominer le reste. Que si j’y remarquai aussi des erreurs ou des déclamations, ce sont filles d’inexpérience et non de mauvaise volonté que je voulus également y laisser. Aucune fin cachée, aucun sentiment de vengeance personnelle ne me dicta cet écrit. J’ai pu me tromper dans ma façon de sentir, ou écrire avec trop de passion. Mais peut-il y avoir excès dans la passion que l’on éprouve pour le juste et pour le vrai, surtout quand il s’agit de la faire partager aux autres ? Je me suis borné à dire ce que je pensais, moins peut-être que je ne sentais. Dans l’ardeur bouillante de cet âge, raisonner et juger n’étaient peut-être qu’une noble et généreuse manière de sentir.






CHAPITRE V.

Un amour digne de moi m’enchaîne enfin pour toujours.


Après avoir ainsi soulagé mon âme ulcérée de sa haine contre la tyrannie, haine conçue en naissant, et chaque jour plus vive, je sentis aussitôt se réveiller mon ardeur pour les œuvres théâtrales ; mais auparavant, ayant lu mon petit livre à mon ami et à un très-petit nombre d’autres personnes, je le cachetai pour le mettre à part, et n’y pensai plus pendant nombre d’années. Cependant ayant