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SIX ANS AUX MONTAGNES ROCHEUSES

et repos, hors la chute de quelques feuilles, le passage brusque d’un vent subit, les gémissements rares et interrompus de la hulotte  ; mais au loin, par intervalles, on entendait les roulements solennels de la cataracte du Niagara qui, dans le calme de la nuit, se prolongeaient de désert en désert et expiraient à travers les forêts solitaires  ».

Après avoir franchi le Niagara, nous contournons la pointe nord-est du lac Érié et serrant de près la rive septentrionale nous courons à toute vapeur vers l’Ouest. Notre train stationne quelques instants à Détroit, puis nous entrons dans l’immense plaine qui sépare le lac Érié du lac Michigan. À la pointe du jour, nous nous trouvons au milieu de cette plaine monotone où d’énormes usines, entr’autres la fameuse fabrique de conserves Armour, nous annoncent l’approche de la grande ville. Vers 8 h. la crête des vagues du lac Michigan blanchit à l’horizon, et enfin après une course de plus en plus rapide nous arrivons à Chicago.

Nous descendons à une gare située à l’entrée de la 12e rue. Les rues de Chicago sont renommées par leur longueur absolument extraordinaire  ; l’une d’elles, m’a-t-on dit, n’a pas moins de 25 kilomètres  ! Cela s’explique par l’espace illimité dont on dispose ici. Veut-on agrandir la ville, on trace une route en ligne droite aussi loin que l’on peut aller  ; bientôt cette route se borde de maisons, la plupart en bois  ; on relie les deux extrémités par une double ligne de tramways électriques, et voilà de quoi loger des milliers de nouveau-venus. La population de Chicago était en 1900 de 1.698.575 habitants  ; elle dépasse aujourd’hui deux millions. La 12e rue est, elle aussi, très longue  ; il nous fallut rouler longtemps en tramway dans un quartier enfumé