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SIX ANS AUX MONTAGNES ROCHEUSES

ces Indiens se rendaient à la ville de Tekoa pour faire leurs provisions, ou simplement pour se promener. Chemin faisant, je remarquais de distance en distance des tentes indiennes dressées dans la plaine. Elles sont de forme conique et ressemblent aux meules de paille qu’on voit dans nos campagnes. On les appelle tepee (tipies). Quelques sauvages, plus riches ou plus industrieux, commencent à se bâtir des maisons confortables. Après une course d’environ deux heures, nous arrivâmes à Desmet, centre de la mission. Sur une légère éminence, s’élève l’église du Sacré-Cœur et près de l’église la résidence du missionnaire, avec un grand bâtiment qui sert d’école des garçons. L’école des filles, tenue par des religieuses canadiennes-françaises, est un peu plus loin. Au pied de la colline et faisant face aux bâtiments de la mission, une centaine de maisonnettes en bois forme le campement des Cœurs d’Alène, lorsque toute la tribu y vient célébrer les principales fêtes religieuses de l’année. Ces bons sauvages accourent à ces réunions avec un empressement extraordinaire, quelquefois de très loin, de 60 ou même de 100 kilomètres.

Nous étions à l’avant-veille de la Toussaint ; j’allai voir une de ces assemblées édifiantes et pittoresques. Dès le soir de mon arrivée, j’assistai dans l’église à la prière faite par les quelques Indiens déjà présents ; c’étaient surtout des femmes âgées, qui, d’une voix nasillarde et traînante, récitaient en commun de longues invocations où le nom de Koline zouten, Grand Esprit, revenait sans cesse. Une d’elles semblait guider les autres ; elle était toujours en avance de quelques mots sur ses compagnes et priait avec une ardeur qu’une toux déchirante ne parvenait pas à ralentir. Il y avait là aussi quelques jeunes femmes avec leurs bébés, qu’elles portent sur le dos, em-