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LIVRE IV. — CHAPITRE I.

l’origine ; les deux livres Πρὸς γεωμέτρας et Πρὸς ἀριθμητικούς, dont l’un est fort court, n’avaient pas encore été séparés[1].

Le premier de ces ouvrages, ainsi que l’indique le titre, est un résumé et comme un bréviaire du scepticisme. Il est divisé en trois livres : le premier définit et justifie directement le scepticisme ; les deux autres le justifient indirectement et renferment une réfutation sommaire du dogmatisme.

Dans le Πρὸς μαθηματικούς, Sextus passe en revue toutes les sciences connues de son temps (τὰ ἐγκύκλια) et s’efforce de démontrer que toutes leurs affirmations ne reposent sur rien, qu’on peut leur opposer sur chaque point des affirmations contraires et d’égale valeur. Les grammairiens, les rhéteurs, les géomètres, les arithméticiens, les astronomes, les musiciens sont successivement pris à partie dans les six livres dont se compose l’ouvrage.

C’est aux philosophes qu’est consacrée la troisième œuvre de Sextus : des cinq livres dont elle est formée, la réfutation des logiciens occupe les deux premiers ; celle des physiciens, les deux suivants ; le dernier est dirigé contre les systèmes de morale[2].

On est en droit d’affirmer que les ouvrages de Sextus ont été composés dans l’ordre suivant[3] : 1o les Hypotyposes ; 2o le livre contre les philosophes ; 3o le livre contre les savants. En effet,

  1. C’est pour ce motif sans doute que Diogène (IX, 116) dit en parlant de Sextus : Οὖ καὶ δέκα τῶν σκεπτικῶν καὶ ἄλλα κάλλιστα. Zeller a bien montré, contre Pappenheim (De Sexti Empirici librorum numero et ordine, Berlin, Weber, 1874. Cf. Die tropen der griech. Skept. p. 19, 2 ; Berlin, 1885) qu’il ne s’agit pas ici des dix tropes attribués à Ænésidème, et non à Sextus, mais bien de dix livres. Suidas parle aussi des δέκα σκεπτικά. Peut-être son témoignage a-t-il un peu plus de valeur que ne lui en attribue Zeller, si, au lieu de considérer Suidas comme un simple copiste de Diogène, on admet, avec Nietzsche (Rhein. Mus., 1868, p. 228), qu’il a puisé à la même source.
  2. À l’exemple de Zeller, et pour plus de simplicité, nous citerons les deux ouvrages de Sextus sous le titre collectif Πρὸς μαθηματικούς, sans les distinguer autrement que par le numéro des livres.
  3. Pappenheim (De S. Emp. libr. num. et ordine) croit que le Πρ. μαθ. est le premier ouvrage de Sextus ; il y découvre des traces de jeunesse et un scepticisme moins décidé que dans les autres. Zeller, avec raison, selon nous, combat cette opinion. S’il y a des différences, et si elles ont quelque importance, elles proviennent