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Page:Victor Devogel - Légendes bruxelloises, 1891.pdf/15

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iv
PROLOGUE

familière des femmes de ces quartiers. Tout ce monde parle à la fois : les mots s’entre-choquent, les quolibets se croisent, les rires résonnent ; le tout forme un ensemble confus montant vers le ciel qui s’obscurcit et qu’on aperçoit là-haut entre les deux rangées de toits qui semblent vouloir se toucher tant les rues sont étroites.

Cependant la nuit vient peu à peu. Les bruits s’éteignent un à un, les mères rentrent avec les bébés, les hommes s’en vont aux cabarets voisins ; il ne reste guère que quelques groupes de jeunes filles et de jeunes gens qui babillent entre eux.

Depuis plusieurs minutes déjà, un autre groupe s’est assis à l’écart sur les marches de l’escalier qui commande l’entrée d’une maison bourgeoise occupant le milieu de la rue. Rapprochés en masse compacte, ils sont cinq, six, huit ou dix gamins, quelquefois muets : on dirait, les voyant là, une réunion de jeunes conspirateurs. L’un d’eux parle ; sa voix trouble à peine le silence de la ruelle ; c’est plutôt un murmure et ceux qui l’écoutent retiennent leur haleine afin de ne perdre aucun des mots qu’il prononce. Quelqu’un s’approche, il baisse la voix encore ; le passant fait-il mine de les examiner, il s’arrête pour reprendre quand l’indiscret a disparu. A peine parvient-on à saisir une phrase lorsque,