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LÉGENDES BRUXELLOISES

l’encre noircissant les doigts et le visage des vénérables matrones ; c’étaient des farces d’enfants terribles, des bouffonneries d’écoliers en vacances, des choses drôles dont on n’osait rire et qui effrayaient parce qu’on ne pouvait comprendre qui était assez fou pour s’amuser de la sorte en ces sombres époques.

Quelques-uns attribuaient ces faits aux âmes de ceux que le duc d’Albe envoyait régulièrement au gibet, au bûcher ou à l’échafaud. D’autres soupçonnaient certains jeunes gens qui parcouraient la ville et habitaient les environs du Petit-Sablon.

Ces derniers disaient vrai.

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* *

Un jour, ces six folâtres jeunes gens — car ils étaient six ― parcouraient le haut de la ville, portant, le premier, un petit chaudron plein de couleur noire, le second, une sorte de petit balai. Les quatre autres ne portaient rien.

Le balai, trempé dans le noir, servait à barbouiller les enseignes des marchands, pendant que les quatre qui ne portaient rien faisaient le guet. Et des rires étouffés, des plaisanteries drôles interrompaient bien souvent le singulier travail de nos écervelés.