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la garçonne

tiplié celle que méritait la décoration inventée par Monique, sur les indications sommaires d’Edgard Lair. Sa renommée avait été, du coup, définitivement consacrée…

Monique Lerbier : sur l’entablement de marbre vert, qui étalait au-dessus des spacieuses vitrines, encadrées d’ébène, sa fastueuse enseigne, le nom désormais adopté du Tout-Paris étalait seul, au lieu de l’inscription primitive, ses fines lettres d’or. Après les mois pénibles du début, où elle avait vu son capital disparaître sans que la clientèle se montrât, voilà qu’en moins d’un an, la vogue aidant, la fortune commençait à venir…

Ce jour-là, — c’était le troisième printemps depuis son départ de l’avenue Henri Martin, — une journée magnifique s’annonçait.

Le corps frais, reposée par la douche glacée dont elle accompagnait ponctuellement son quart d’heure de culture physique, Monique jouissait, sans arrière-pensée, de l’équilibre heureux de sa force.

Elle déployait, aidée par Mlle Claire, — lieutenant vigilant et précieux, des étoffes lamées, en faisait jouer les plis lumineux, dans la splendeur matinale… Lucienne Marnier, au dernier moment, avait voulu changer le rideau de fond sur lequel les danses de Peer Rys devaient découper, le soir même, leur nudité sculpturale. Au lieu du velours uni, — dont le bleu lavande, dans l’encadrement des tentures corail brochées d’ors de couleur, faisait un repoussoir un peu fade, — elle souhaitait quelque étoffe plus somptueuse, pour enchâsser le bijou vivant.

— Non, pas de rose, ni de rouge ! déclara Monique. Restons dans les complémentaires… Ça, peut-être ?…