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Page:Vidal de la Blache - Tableau de la geographie de la France, 1908.djvu/200

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la Loire et du Cher s’assombrir, au sommet, par des lignes de forêts. La vie seigneuriale et princière se complut à certaines époques dans ces demi-solitudes giboyeuses ; elle y dressa des châteaux. Chambord découpe comme dans un paysage de contes de fées les silhouettes de ses tourelles. Mais en général, dans cette France centrale où tant de rapports se nouent, ces pays, Brenne, Sologne, représentent et surtout représentaient une vie à part, pauvre, souffreteuse, défiante. Un certain charme pittoresque n’en est pas absent : mais il a lui-même quelque chose d’étrange ; il tient surtout aux effets du soir, aux obliques rayons dont s’illuminent ces mares dormantes, ces bruyères et ces ajoncs entre les bouleaux et les bouquets de pins. C’étaient des taches d’isolement, de vie chétive, interrompant la continuité des campagnes fertiles.

Ces sables quartzeux à particules granitiques, associés à des graviers et à des argiles, sont des dépôts de transport qui tirent leur origine du Massif central. Lorsque, dans la période tertiaire, l’ancien massif, presque réduit par l’usure des âges à l’état de plaine, commença à se relever dans le Sud et dans l’Est, toutes les forces de l’érosion se ravivèrent. La région surexhaussée livra ses flancs à une destruction dont les dépouilles, entraînées vers le Nord et l’Ouest, formèrent de larges nappes détritiques. Des terrains argileux et froids jonchent ainsi la surface. Chacune de ses nappes correspond à un pays que signale un nom d’usage populaire, traduisant à la fois la nature du sol et le caractère des habitants. Ici les noms de Sologne et de Brenne s’opposent aux Champagnes berrichonnes.

La partie méridionale du Bassin parisien a par là le caractère d’une région de transition. On n’y trouve plus la même netteté de zones que dans l’Est, la même ampleur et régularité que dans le centre du bassin. Nous avons indiqué une des causes qui contribuent à brouiller les traits : il en est une autre, sur laquelle nous aurons à revenir : c’est le divorce accompli tardivement entre le faisceau fluvial de la Seine et celui de la Loire. Ce démembrement n’a pas suffi pour détruire l’unité fondamentale du bassin, mais il a donné naissance à des rapports nouveaux. Les influences de l’Ouest et du Sud le disputent à celles du Nord. Les vieilles divisions historiques seraient là pour nous en avertir. Nous allons quitter la Lugdunaise pour l’Aquitaine romaine ; une Aquitaine, il est vrai, d’extension factice, qui comprend le Massif central presque en entier, et qui, dans la suite, est devenue la province ecclésiastique de Bourges.


I. — NIVERNAIS

POURTANT entre le Morvan et la Loire, il y a une contrée qui est toujours restée distincte aussi bien de l’Aquitaine première que du Berry et du siège métropolitain de Bourges. Le cours de la Loire, de Nevers à Cosne, marque une des limites les plus persistantes de notre histoire : limite ecclé-