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Page:Vidalenc - William Morris.djvu/146

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et moins pénibles mais elle ne saurait suffire à tout. On ne s’attend pas à voir Morris énumérer toutes les industries qui peuvent admettre l’emploi des machines et préciser dans quelle mesure ; il a simplement voulu rappeler que l’introduction des machines dans l’industrie marque à la fois un progrès et un recul. Elles permettent d’obtenir certaines qualités au détriment d’autres qui sont désormais sacrifiées, et ces pertes sont plus considérables qu’on ne le pense généralement. Il nous est loisible aujourd’hui de trouver que la défiance de Morris était excessive, mais qu’on se souvienne du rôle des machines dans la production des arts décoratifs aux environs de 1860 et 1870, des espérances qu’on fondait sur elles, et on comprendra tout ce que ses craintes avaient de légitime.

L’artisan sera donc nécessairement un artiste, une intelligence et non pas un manœuvre. On objecte souvent, et on objectait à Morris, que, dans ce que nous appelons les industries d’art, il y a presque toujours deux catégories de travailleurs ; les uns, dessinateurs ou inventeurs qui imaginent et composent des modèles nouveaux et font vraiment œuvre de créateurs et d’artistes, les autres, simples manœuvres, qui n’ont qu’à exécuter le modèle dessiné sans y rien changer et auxquels on demande simplement de l’habileté manuelle. C’est précisément contre cette division du travail que protestait Morris ; en apparence, elle facilite la production, mais le plus souvent, elle ne réussit qu’à amener les uns à se désintéresser complètement des questions pratiques et