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Page:Vidocq - Mémoires - Tome 1.djvu/371

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renversaient les maisons, déracinaient les arbres et soulevaient des vagues qui menaçaient à chaque instant d’engloutir notre embarcation. Elle présentait, en ce moment, un spectacle affreux : à la rapide lueur des éclairs, on eût vu deux cents hommes enchaînés comme pour leur ôter tout moyen de salut, exprimer par des cris d’effroi les angoisses d’une mort que le poids des fers qui les réunissaient rendait inévitable ; sur ces physionomies sinistres, on eût lu le désir de conserver une vie disputée à l’échafaud, une vie qui devait s’écouler désormais dans la misère et l’avilissement. Quelques-uns des condamnés montraient une impassibilité absolue ; plusieurs, au contraire, se livraient à, une joie frénétique. Se rappelant les leçons du jeune âge, un malheureux bégayait-il quelque pieuse formule, ces derniers agitaient leurs fers en chantant des chansons licencieuses, et la prière expirait au milieu de longs hurlements.

Ce qui redoublait la consternation générale, c’était l’abattement des mariniers qui paraissaient désespérer de nous. Les gardes n’étaient guère plus rassurés : ils firent même un mouvement comme pour abandonner le bateau, que l’eau remplissait à vue d’œil. Alors la scène