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CHAPITRE IX.

si peu nombreux encore et si mal compris, eussent-ils eu la valeur de véritables preuves scientifiques ? Que ceux, dont ils venaient fortifier l’opinion, les admissent ou s’en armassent contre leurs adversaires, on devait s’y attendre, et cela fut. Mais ceux qu’ils condamnaient, ne pouvaient manquer d’avoir une autre logique. Comme Vallisneri à Vogli, signalant l’absence du cœur chez un Acéphalien, ils répondaient : Vous annoncez un fait isolé, contraire à l’ensemble des faits connus ; je le rejette comme erroné ; ou bien encore : J’admets ce fait, mais qu’en résulte-t-il ? rien ; ce n’est qu’un jeu de la nature.

Et à leur point de vue, ils avaient raison. Existe-t-il, d’un côté, des êtres normaux, soumis, dans leur évolution et leur conformation, à des lois déterminées ; de l’autre, des êtres anomaux, étrangers, non-seulement à ces lois, mais à toute loi : il n’y a absolument rien à conclure des uns aux autres ; rien de commun entre la science qui traite des premiers, et la branche, indigne du nom de science, qui a pour objet la connaissance de ceux-ci ? Admettez-vous, au contraire, que les Monstruosités ont aussi leurs lois ? Considérez-vous ces-lois comme réductibles aux lois de l’ordre normal ? Par cela même, vous faites tomber la barrière qui s’élevait devant la tératologie : la connaissance des derniers peut et, dès lors, elle doit devenir le complément de celle des premiers. Dans la discussion de tous les problèmes