Page:Viennet - Promenade philosophique au cimetière du père la Chaise.djvu/284

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états, et laissent dévorer les républiques de Gênes ou de Venise ; qui relèvent les anciennes métropoles et s’en attribuent les colonies ; qui protègent d’une main l’émancipation des Amériques et combattent de l’autre la régénération de la Grèce ? Telle est depuis trois mille ans la politique des arbitres du monde. Henri IV vouloit purger la terre de cette puissance capricieuse qui ressemble à la fatalité des anciens : le poignard de Ravaillac nous a replongés dans le chaos de ses incohérences. Les temps, les lieux, les circonstances, le hasard, tout influe sur ses résolutions et son langage. Altière et menaçante dans la victoire, souple et rampante dans l’adversité, mensongère par-tout, elle n’a ni lois ni régies, et nous impose des dogmes à défaut de principes. Elle a créé sous le nom de droit public une science plus incertaine que la science des augures, et sous le nom de raison d’état un être chimérique, qui justifie ses aberrations, et qu’elle oppose à tous les reproches. Appuyée sur ces deux fantômes, elle va comme il plaît à la fortune, blâmant aujourd’hui ce qu’elle approuvoit hier, louant dans les uns ce qu’elle punit