Page:Viennet - Promenade philosophique au cimetière du père la Chaise.djvu/94

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la disgrâce des tribuns, dont le despotisme naissant n’avoit pu souffrir la noble indépendance. Il rentra dans la vie privée sans s’apercevoir qu’il en fût jamais sorti ; et lorsqu’après la chute de l’homme qui l’avoit froissé dans sa carrière politique, on essaya de réveiller ses ressentiments, de provoquer la vengeance de sa plume, il répondit aux émissaires de la haine et de la calomnie : « Adressez-vous à ceux qui l’ont flatté, ils le déchireront mieux que moi. » Il ne fut pas trompé dans ses pressentiments. Il connoissoit trop bien cette race d’écrivains à gages, figurants obligés de tous les triomphes, mobilier chantant de toutes nos fêtes publiques, et qu’on ne sauroit mieux comparer qu’à ces ifs, ces lampions et ces guirlandes, qui servent depuis trente ans à l’illumination de nos palais et de nos jardins. Vous savez, madame, quelle explosion d’injures succéda tout-à-coup à ce concert de louanges qu’avoient fait entendre les mêmes bouches, combien de poèmes changèrent de héros, combien de tableaux changèrent de couleur avec la même rapidité que les palais avaient changé de