Page:Vignon - Un drame en province - La Statue d Apollon.djvu/20

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glant dans son casaquin, de peur que son père ne devine sa situation… enfin, se sauvant dans les bois au moment où elle sent une première douleur… Là, elle se délivre seule… et, dans le spasme nerveux d’une suprême angoisse, elle aperçoit à ses pieds un enfant vivant à peine, et la terre froide… mais muette… — Avez-vous quelquefois eu le vertige, madame ?…

La marquise, frappée de stupeur, frissonnait, mais se taisait toujours.

— Avec un peu d’argent, elle pourrait partir pour Paris, aller à l’hospice…

— Oui ! monsieur le curé, s’écria madame de Fayan avec une vibrante énergie, comme si elle venait de triompher soudain d’une lutte cruelle. Tout ce que vous voudrez ! tout ! tout !… Et pour moi… n’importe ! ajouta-t-elle comme se parlant à elle-même.

— Madame, vous êtes bonne, dit le prêtre étonné, mais heureux de cette explosion qui succédait à tant de froideur. Je savais bien qu’on trouve, surtout, la vertu indulgente et pitoyable. Mais je me sens bien contrit d’avoir été forcé de vous demander ce sacrifice dans un moment où il paraît tant vous coûter.

— J’avais pour moi-même un grand besoin d’ar-