Page:Vignon - Un drame en province - La Statue d Apollon.djvu/231

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Mais on eût dit que cette voix, tout à l’heure si pleine et si sonore, devenait tremblante. Après le premier mouvement d’indignation, la comtesse se remit à marcher dans la chambre. Elle écoutait malgré elle, et peu à peu se rapprochait de la fenêtre… Cette voix, qui tremblait et semblait se mouiller de larmes, fit tomber sa colère. Son cœur se serra, et, bientôt, ce fut elle qui pleura.

« Ah ! » pensa-t-elle en quittant cet angle de fenêtre, où elle s’était blottie pour écouter sans que son ombre pût la trahir et en allant tomber sur son fauteuil ; « ah ! quelle étrange fascination me poursuit ? À quel cauchemar suis-je en proie ?… La nature humaine a-t-elle donc de ces faiblesses imprévues… de ces heures de vertige ?… »

Elle pleura quelques instants, et ses larmes la soulagèrent. Le chanteur se tut. Cependant Mme de Morelay se sentit encore trop agitée pour trouver le sommeil. Elle prit un autre livre ; celui-là, peut-être, était le contre-poison du premier, car, après un moment de lecture, ses yeux, encore voilés de larmes, s’éclaircirent, sa physionomie reprit une expression de calme, et elle parut s’intéresser au récit du conteur sans en être troublée.

C’était encore un livre français qui lui était tombé