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CHANT III.

Son aile se dépouille, et son royal manteau
Vole comme un duvet qu’arrache le couteau ;
Dépossédé des airs, son poids le précipite ;
Dans la neige du mont il s’enfonce et palpite,
Et la glace terrestre a d’un pesant sommeil
Fermé cet œil puissant respecté du Soleil.


Tel retrouvant ses maux au fond de sa mémoire,
L’Ange maudit pencha sa chevelure noire,
Et se dit, pénétré d’un chagrin infernal :
— « Triste amour du péché ! sombres désirs du mal !
« De l’orgueil, du savoir gigantesques pensées !
« Comment ai-je connu vos ardeurs insensées ?
« Maudit soit le moment où j’ai mesuré Dieu !
« Simplicité du cœur ! à qui j’ai dit adieu,