des pierres solides et éprouvées. Il les met longtemps en réserve avant de les mettre en œuvre. Il choisit entre elles la pierre d’assise de son monument. Autour de cette base il dessine son plan, et quand il l’a de tous côtés contemplé, refait et modelé, il permet enfin à ses mains d’obéir aux élans de l’inspiration. – Mais, dans le travail même, il est encore contenu par l’amour de l’idéal, par le désir ardent de la perfection. Mécontent de tout ce qui n’entre pas dans l’ordre pur qu’il a conçu, il se sépare de son œuvre, en détourne les yeux, l’oublie longtemps pour y revenir. Il fait plus, il oublie l’époque même où il vit et les hommes qui l’entourent ; ou, s’il les regarde, ce n’est que pour les peindre. Il ne songe qu’à l’avenir, à la durée de sa construction, à ce que les siècles diront d’elle. – Il ne voit que les générations qui viendront respirer à l’ombre de son monument, et il cherche à le faire tel qu’elles trouvent à la fois, le bien dans son usage, le beau dans sa contemplation.
Qu’il soit poète ou grand écrivain, cet homme, ce tardif conquérant, ce possesseur durable de l’admiration, c’est le Penseur.
L’autre n’a pris dans l’étude que les forces qu’il lui fallait pour se préparer à la lutte de chaque jour. Il porte sur tous les points sa parole et ses écrits. Il aspire non-seulement à