Page:Vigny - Héléna, 1822.djvu/52

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ainsi criait l’Émir, et dans sa main sanglante
S’agitait de Damas la lame étincelante ;
Son cheval bondissant écumait sous le mords,
Et ses fers indignés glissaient au sang des morts,
Quand le maître animait sa hennissante bouche,
Et d’un large étrier pressait le flanc farouche.
Éveillés à ses cris, ses soldats basanés
S’avancent d’un pas ivre et les yeux étonnés.



Quand le tigre indolent sorti de sa mollesse
De ses flancs tachetés déployant la souplesse,
À saisi dans ses bonds le chevreuil innocent,
Long-temps après sa mort il lèche encor son sang,
Il disperse sa chair d’un ongle plein de joie,
Roule en broyant les os et s’endort sur sa proie.
Non moins lâche et cruel, le Musulman trompeur
Se venge sur les morts d’avoir senti la peur :
Il demande la paix, il l’obtient par la feinte ;
Puis, la tête ennemie, offerte à lui sans crainte,