Page:Vigny - Héléna, 1822.djvu/60

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« J’y vais trouver ensemble et ta main et ta grâce :
« Qu’as-tu fait que la gloire et notre amour n’efface ? »
Mais elle s’avançait : « Ne parlez pas ainsi,
 Vous allez m’affaiblir ; Dieu m’a conduite ici ! »
Et le délire alors semblait troubler sa vue
Vers le temple brûlant toujours, toujours tendue.
« C’est Dieu qui me fait voir quel doit être mon sort !
« Silence ! taisons-nous ; j’entends venir ma mort ! »
On entendait, au fond de l’église en tumulte,
Des hurlements, des cris de femmes, et l’insulte,
Et le bruit de la poudre et du fer. Cependant
Un nuage de feu sortait du toit ardent.
« Mon ami, disait-elle, ô soutenez mon âme !
« Rendez-moi forte : hélas ! je ne suis qu’une femme ;
« Quand je vous vois, je sens que j’aime encor le jour ;
« Il ne me reste plus à vaincre que l’amour ;
« Pour l’autre sacrifice, il est fait. » Et ses larmes
Qu’elle voulait cacher, l’ornaient de nouveaux charmes.
Lui, la priait de vivre, et ne comprenait pas
Quels chagrins l’appelaient à vouloir le trépas.
Elle était sur son cœur ; sa tête était penchée.
On croyait-qu’à ses cris elle serait touchée ;