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poèmes antiques et modernes


XI


Dieu fasse grâce à l’année où nous sommes !
Ce sont vraiment des femmes et des hommes ;
Leur foule entonne un Te Deum en chœur,
Et dans le sang trempe et dévore un cœur,
Cœur d’Amiral arraché dans la rue.
Cœur gangrené du schisme de Calvin.
On boit, on mange, on rit ; la foule accrue
Se l’offre et dit : C’est le Pain et le Vin[1].

XII


Un moine qui masque
Son front sous un casque
Lit au maître-autel
Le livre immortel ;
Il chante au pupitre,
Et sa main trois fois,
En faisant la croix,
Jette sur l’épître
Le sang de ses doigts.

XIII


« Place ! dit-il ; tenons notre promesse
D’épargner ceux qui viennent à la messe.
Place ! je vois arriver deux enfants :
Ne tuez pas encor, je le défends ;
Tant qu’ils sont là, je les ai sous ma garde.
Saint Paul a dit : Le temple est fait pour tous[2] ;

  1. Var : A-C3, le pain et le vin.
  2. Saint Paul, Ephès., II, 19-22 : Vous n’êtes donc plus des étrangers qui sont hors de leur pays et de leur maison ; mais vous êtes citoyens