Page:Vigny - Stello ou Les diables bleus, 1832.djvu/175

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

lui-même, de vivre de sa propre essence et de s’en nourrir pleinement et glorieusement dans sa solitude ? Il cède à l’attraction des choses extérieures ; il se quitte lui-même, cesse de sentir, et s’abandonne au souffle grossier des événements communs.

« Il faut, vous dis-je, que j’achève de vous relever de cet abattement, mais par degrés et en vous contraignant à suivre, malgré ses fatigues, le chemin fangeux de la vie réelle et publique, dans lequel, ce soir, nous avons été forcés de poser le pied. »

Ce fut, cette fois, avec une sombre résolution d’entendre, toute semblable aux forces que rassemble un homme qui va se poignarder, que Stello s’écria :

« Parlez, monsieur. »

Et le Docteur Noir parla ainsi qu’il suit, dans le silence d’une nuit froide et sinistre :