Page:Vigny - Stello ou Les diables bleus, 1832.djvu/231

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sur ses épaules une sorte de peignoir blanc, elle s’assit sur le bord de son lit pour m’offrir une chaise de paille, le seul meuble de sa prison. — Je m’aperçus alors qu’un de ses pieds était nu ; et qu’elle tenait à la main un petit bas de soie noir et brodé à jour.

« Bon Dieu ! dis-je ; si vous m’aviez fait dire un mot de plus…

— La pauvre reine en a fait autant ! » dit-elle vivement, et elle sourit avec une assurance et une dignité charmantes, en levant ses grands yeux sur moi ; mais bientôt sa bouche reprit une expression grave, et je remarquai sur son noble visage une altération profonde et nouvelle, ajoutée à sa mélancolie accoutumée.

— Asseyez-vous ! asseyez-vous ! me dit-elle en parlant vite, d’une voix altérée et avec une prononciation saccadée. Depuis que ma grossesse a été déclarée, grâce à vous, et je vous en dois…

— C’est bon, c’est bon, dis-je en l’interrompant à mon tour, par aversion pour les phrases.

— J’ai un sursis, continua-t-elle ; mais il va,