combattre quelques heures plus tard, mais ces braves gens ne découvrirent aucun indice qui pût les fixer à cet égard : d’un côté comme de l’autre, chacun était impénétrable, et rien ne faisait reconnaître les amis ou les ennemis. Cette incertitude était poignante pour des hommes convaincus que le soir même la mort circulerait dans leurs rangs, arrachant violemment plusieurs d’entre eux à ce que le poète Gilbert a appelé le banquet de la vie ; aussi les bons matelots attendaient-ils avec une nerveuse impatience le moment de l’action.
À neuf heures, c’est-à-dire à l’heure du coucher, le réflecteur électrique installé dans la case était remplacé par une lampe à l’huile, dont la clarté n’éclairait que faiblement. Ce soir-là, le réflecteur resta en place. Plus d’un crut à une négligence du mécanicien et ne s’en préoccupa point.
Vers minuit, au moment où le plus grand silence régnait parmi les marins qui, tous, semblaient plongés dans le plus profond sommeil, une tête se souleva, puis une seconde, et enfin, plusieurs autres. Après avoir échangé quelques signes, huit hommes quittèrent sans bruit leur hamac et vinrent silencieusement se réunir autour du Gascon. Presque aussitôt, des lames de couteaux lancèrent de sinistres reflets sous la clarté de la lampe électrique.
Après s’être consultés un instant à voix basse, les révoltés se dirigèrent, sur la pointe du pied, vers l’angle de la case où reposaient le capitaine et son ami.
Arrivés là, ils s’arrêtèrent quelques secondes, prêtant l’oreille au moindre bruit, mais le silence qui régnait autour d’eux les rassura, et le Gascon écarta brusquement la