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la famille dufour

Cependant, le temps s’écoulait, et rien ne faisait prévoir qu’il dût bientôt retourner à Québec. Le brave Dufour avait compté sur la rencontre fortuite d’un chasseur qui se chargerait de reconduire le jeune homme près de son père, mais il avait vainement attendu. C’était à croire que le désert était abandonné de ses hôtes habituels.

Enfin, un soir, un coureur des bois se présenta devant le pont-levis, relevé depuis quelques minutes seulement.

Le fermier, prévenu par ses serviteurs, se rendit sur le retranchement.

— Que désirez-vous ? demanda-t-il à l’inconnu dont la silhouette se profilait en sombre sur le bord du fossé.

— Je désire ce que l’on ne refuse jamais au désert : l’hospitalité pour une nuit.

— Je suis prêt à vous accorder ce que vous demandez, mais après que vous m’aurez fait connaître les motifs de votre arrivée ici, à une heure aussi avancée.

— Votre demande est extrêmement juste : je suis un chasseur traqué par des bandits. Quant à mon nom, bien qu’il vous soit probablement inconnu, je n’en fais pas mystère. Je me nomme Sans-Peur.

— Sans-Peur ! s’écria le fermier d’une voix tonnante. C’est Dieu qui vous envoie !

Deux minutes plus tard, Sans-Peur franchissait le pont-levis.

Le Canadien lui tendit amicalement la main.

— Joseph Dufour ! s’écria le chasseur, qui n’en croyait pas ses yeux. Que diable faites-vous ici ?

— Vous le voyez, dit en riant le fermier, je vous tends la main.

— Pardonnez-moi, dit vivement Sans-Peur en serrant la main loyale de son interlocuteur, mais la surprise !…

— Vous n’êtes pas au bout.

— Hein ! Que voulez-vous dire ?

— Suivez-moi et vous le saurez.