Taréas n’était pas moins embarrassé que son ami. Les trépignements qu’il croyait remarquer sur le bord du fleuve lui faisait craindre qu’une lutte se fût engagée en cet endroit.
— Que pensez-vous de tout cela ? dit le chasseur en regardant fixement le Huron.
— Je pense comme mon frère, répondit Taréas : il s’est passé ici quelque chose d’extraordinaire.
— Oui. Mais quoi ?
Les deux hommes se courbèrent vers le sol et se livrèrent à de minutieuses investigations.
En suivant les traces des pas de James, Sans-Peur atteignit le pied d’un arbre qu’il examina avec la plus scrupuleuse attention.
— Oh ! oh ! fit-il tout à coup.
— Mon frère a-t-il découvert quelque chose ? dit Taréas en accourant.
— Regardez cet arbre.
— Eh bien ?…
— Ne voyez-vous pas que l’écorce est entamée par place ?
— C’est vrai.
— Comprenez-vous, maintenant ?
— Non. Que mon frère s’explique.
— Les bandits avaient caché une pirogue dans cet arbre.
— Mon frère en est sûr ?
— Oui.
— En ce cas cela doit être.
— Vous pouvez vous en assurer. Regardez les branches, là haut ; elles ont été écartées violemment ; plusieurs même sont cassées. De plus, il y a, au pied de cet arbre, des feuilles qui ne sont pas tombées seules, car elles sont encore vertes.
— Mon frère parle bien, dit le chef avec une certaine admiration. Les paroles que souffle sa poitrine lui sont dictées par le Wacondah.
— Je vous remercie du compliment, chef, mais ce que je viens de découvrir complique singulièrement la situation.