Il y a bien près de trois cents ans qu’un envoyé
de Venise, François Contarini , découvrit dans
les Pays-Bas un manuscrit qui lui parut d’un
grand intérêt pour l’histoire de sa patrie. Il con
tenoit une relation de la prise de Constantinople
en 1204, par les barons françois réunis aux sol
dats de la sérénissime République. L’auteur, l’un
de ceux qui avoient pris à ce grand événement la
part la plus honorable et la plus active , se nom
moit Joffroi de Villehardouin. Il étoit originaire
de la province de Champagne ; mais le lieu de sa
naissance ne sembloit pas avoir fait une seule
fois gauchir ses jugemens, et dans la distri
bution qu’il avoit faite entre les conquéraus de
la part de gloire qui revenoit à chacun d’eux , il
avoit surtout accordé le tribut de ses éloges aux
Vénitiens, pour leur loyauté dans la conclusion et
l’exécution des traités, pour leur bravoure dans les
combats et pour leur prudence dans les conseils.
L’ambassadeur acheta le manuscrit : au retour de