Page:Villemain - Discours et mélanges littéraires.djvu/113

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obtenu du sultan de Maroc l’engagement d’excommunier Abdel-Kader, on pourrait bien en tirer la promené de laisser voir, copier, et même emporter quelques vieux parchemins arabes traduits du grec.

Tout cela est bien loin maintenant ; et j’ai bien peu d’autorité pour en parler ; mais il ne saurait être malséant de rappeler ces souvenirs, de présenter ces indices à la pensée du public ami des lettres, et des hommes éclairés qui se trouveraient avoir quelque puissance. Le pays de l’illustre Sylvestre de Sacy, le pays qui compte dans la même carrière des savants si éminents, des Quatre-mère, des Reynaud, des Caussin de Perceval, des de Saulcy, des Noel des Vergers, et de jeunes et brillants élèves de leur science, tels que M. Renan, l’auteur de la belle Notice sur Mahomet, le pays de la science désintéressée, comme des sciences utiles, ne saurait, aujourd’hui qu’il a tant de rapports de commerce et de pouvoir avec la population arabe, regarder indifféremment aucune des occasions d’étude et de découverte érudite que peut donner l’Afrique. Peut-il en exister une plus pure, plus honorable aux yeux de l’Europe, que la chance d’un accroissement à ces trésors du passé à ces monuments de philosophie et de génie que nous a transmis la Grèce, que la France a si souvent interprétés ou égales, et qui sont devenus la richesse commune de tous les peuples civilisés ? Tandis qu’un zèle faux ou trompé propose aujourd’hui d’abandonner l’étude des chefs-d’œuvre antiques, ne négligeons rien pour en accroître le nombre, et pour recueillir quelqu’un de ces immortels débris encore cachés dans quelque coin du monde. Le plus précieux peut-être, celui qui par la nature toute positive, toute substantielle des notions qu’il doit contenir, pourrait le mieux sortir, sans dommage, d’un intermédiaire arabe et nous rendre le libre et beau génie de la Grèce, à travers les ténèbres de l’oppression musulmane, ce serait le grand recueil politique d’Aristote *Lt n~Te~t. Faisons des vœux pour qu’il nous soit restitué ; et n’en désespérons pas, s’ii est bien cherché. C’est par une voie semblable, on le sait, que le moyen âge connut d’abord la philosophie d’Aristote ; c’est par là qu’est arrivée à l’Europe savante une partie du traité des Sections coniques d’Apollonius. La langue arabe doit ainsi recéler encore bien d’autres débris de la science des Grecs, plus faciles à transmettre d’un idiome à