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DE PASCAL,
considéré
COMME MORALISTE ET COMME ÉCRIVAIN.

En parcourant la variété des connaissances humaines, on aperçoit deux grandes divisions de l’intelligence, auxquelles tout vient se réunir. Dans l’une, l’esprit s’exerce sur la matière ; dans l’autre, sur lui-même ; l’une renferme toute la science des objets extérieurs, depuis la mécanique la plus vulgaire jusqu’à celle des cieux ; l’autre n’a pour objet que notre cœur ; et ses instruments sont la morale, l’éloquence et la poésie.

Un même génie peut-il rassembler en lui ces deux forces opposées ? ou leur séparation est-elle aussi invincible que leur différence est manifeste ? Lorsque la science physique était à ses commencements, incomplète et grossière, elle ne pouvait seule suffire à toute l’activité d’une tête puissante : et d’ailleurs, elle avait besoin de t’imagination, pour couvrir ses ignorances et ses erreurs. Pythagore, qui porta chez les Grecs la science des nombres, enseignait la morale en vers harmonieux ; et le divin Platon étayait sur la géométrie sa brillante métaphysique. Mais quand la science eut recueilli dans son domaine des multitudes d’observations et de faits, elle dut se retirer à part et ne