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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/165

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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

sur les âmes, et les épurer par l’enthousiasme. La sagesse dont il était le disciple, les croyances qu’il avait recueillies sur l’essence divine de l’âme et la vérité absolue, fortifiées de sa puissante parole, trouvaient près de lui d’autres maîtres pour les enseigner, d’autres poëtes pour les chanter. Nommons d’abord, à ce titre, un philosophe né dans les lieux qu’habita souvent Pindare, et mêlé dans sa jeunesse aux fêtes que le poëte avait illustrées. Empédocle, en effet, né dans Agrigente, avait, nous apprend Aristote, remporté le prix de la course équestre dans les jeux de la soixante-onzième olympiade. Quoiqu’il n’eût pas été disciple de Pythagore, il reçut la tradition récente encore de ses leçons : il y joignit les voyages en Orient, dont profita de bonne heure le génie grec, à part la supériorité que ses lois et ses arts lui donnaient sur les peuples que la Grèce appelait barbares. On ne peut douter qu’Empédocle n’ait visité surtout l’Égypte, d’où Hérodote et Platon devaient tirer des faits certains en histoire, et, ce qui n’est pas moins précieux, des vérités en morale.

Au retour de ses voyages, et sous le renom célèbre de sa secte, Empédocle fut accueilli dans les villes libres de Sicile comme un sage, un enchanteur, un poëte, un musicien tout-puissant. Très-grande de son vivant, sa célébrité s’accrut avec le temps dans l’imagination des Grecs ; et, après le grand siècle des ans et de la science, lorsque le monde polythéiste