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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

crite sur les noces infidèles de Ménélas et d’Hélène, Bossuet semble plus épris encore de cette concise et poétique philosophie des Hébreux, de ces courts axiomes, de ces symboles parlants qui remplissent les livres de Salomon et ceux du fils de Sirach.

Par toutes ces préférences, Bossuet, le plus grand lettré, comme le plus grand inspiré des siècles nouveaux de l’Église, et le moderne du génie le plus antique, touchait intimement, sans le vouloir, à cette poésie lyrique et gnomique, dont Pindare fut l’Homère. Malgré le grand creux qu’il trouvait, dit-il quelque part, dans l’antiquité profane, il était en intelligence, en harmonie de l’âme avec cette poésie morale venue de Pythagore et déclarée sainte par Platon, toute pleine d’éclatantes peintures et de graves pensées, et souvent si chaste et si haute, que les premiers pères de l’Église l’accusaient d’avoir dérobé la parole de Dieu, comme Israël les vases d’Égypte, et que Clément d’Alexandrie en particulier prétendait noter dans Pindare bien des traits empruntés aux chants de David et à la sagesse de Salomon. Mais de telles ressemblances, dont nous parlerons ailleurs, n’étaient prises peut-être qu’au trésor inépuisable des sentiments humains, et à ces rencontres du génie, perpétuelle révélation que Dieu donne à l’homme.

Une autre disposition encore rapprochait naturellement le langage de l’évêque moderne et celui du chantre thébain. C’était un instinct de la grandeur sous