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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

grec, ni sous l’appellation latine qu’elle reçut plus tard. Mais, eu retour, un dieu tout italique, ignoré de la Grèce, Janus, était appelé le dieu des dieux dans ces hymnes saliens dont Horace devait se moquer un jour.

Pour nous, studieux collecteurs des reliques de l’antiquité, réduits souvent à la deviner sur de bien faibles indices, nous croyons, avec un de ses plus beaux génies, que chez les Grecs, innover dans la musique, c’était bouleverser l’État ; nous voyons la constitution de Sparte garantie par ce magistrat qui coupe deux cordes nouvelles ajoutées à la lyre d’Alcman ; et nous supposons, en revanche, sur le théâtre et dans les fêtes d’Athènes une musique aussi hardie, aussi diverse que les orages de la démocratie.

Rien de pareil, sous la forte institution des premiers Romains, sous cette institution sévèrement gardée par la pauvreté, le travail et la guerre. Et toutefois ce peuple, par son climat, par son origine, avait, on ne peut en douter, plus d’une affinité naturelle avec la Grèce. Mais son premier gouvernement, dont il lui resta toujours quelque chose de rapide et d’impérieux, son patriciat sacerdotal et militaire, ses habitudes d’épargne et d’avidité, en faisaient un peuple politique, et nullement artiste comme les Grecs.

Ce n’est pas à dire toutefois que ces mœurs âpres et laborieuses, cet esprit appliqué à l’art de la guerre, cette ambition de la patrie commune et de chaque citoyen n’aient eu leur enthousiasme et, partant, leur