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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

tomène l’honneur de la palme pythique ; car tu sais donner le bonheur et en jouir à propos. Mais aussi, c’est toi qui, lorsque la rébellion intraitable est lancée dans les cœurs, terrible, à ton tour, fais face au pouvoir des méchants et refoules la violence au fond de sa sentine ! Porphyrion ne te connaît pas, dans ses révoltes contre le droit suprême. Le gain le plus précieux, c’est celui qui s’obtient de la volonté libre ; mais la violence fait trébucher tôt ou tard même le plus superbe. Le monstre cilicien aux cent têtes, Typhon, ne s’en sauva pas, ni le roi des géants ; ils furent domptés par le tonnerre et par les flèches de ce dieu Apollon, qui, d’un cœur bienveillant, a reçu le fils de Xénarque, revenant de Cirrha, couronné de l’herbe du Parnasse et des chants doriques[1]. »

Et il poursuit cet éloge de la paix domestique, de la tranquille discipline des cités, dans la patrie de l’impétueux Achille : tant il semble surtout vouloir armer les hommes contre ce géant aux cent têtes, ce monstre populaire, dont la force brise tout, si la loi ne l’arrête !

Cet esprit dorien va même dans Pindare jusqu’à consacrer par ses éloges des princes, que la liberté grecque nommait des tyrans. Ce n’est point là cependant l’apothéose servile que Rome prodigua plus tard, de Virgile à Lucain. Pindare ne divinise pas ces maîtres, dont il aime le stable pouvoir ; il n’adore pas leurs pas-

  1. Pind., ed, Boiss., Pyth. VIII., p. 152.