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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

thologiques et d’épithètes sonores, dont le génie de Pindare ne s’est pas toujours assez défendu.

Quoi qu’il en soit, élève ou non de Corinne, Pindare paraît avoir été quelquefois son rival, et même il aurait été vaincu par elle dans un ou plusieurs concours de poésie. Un témoignage très-authentique nous l’affirme, celui de Pausanias, l’exact voyageur sachant déjà étudier en antiquaire les monuments de sa glorieuse patrie, devenue romaine. Après avoir remarqué, dans sa description de Tanagre, que les habitants de cette ville ont su le mieux, parmi les Grecs, régler ce qui concerne le culte divin, toujours attentifs à placer les temples à part, dans un lieu pur, loin de l’habitation des hommes, il ajoute, apparemment par cette liaison d’idées naturelle entre le culte et la poésie : « Le tombeau de Corinne[1], qui seule, à Tanagre, a fait des hymnes, est placé dans le lieu le plus découvert de la ville. Il y a aussi dans le gymnase un portrait de Corinne, la tête couronnée de bandelettes, pour la victoire qu’elle avait remportée au concours de poésie, sur Pindare, à Thèbes. Elle vainquit, ce me semble, à la faveur de son dialecte, ne se servant pas de la forme dorique comme Pindare, mais de celle que les Éoliens devaient mieux saisir, et aussi parce qu’elle était la plus belle femme d’alors, comme on peut le supposer d’après son portrait. »

  1. Paus. Bœot., cap xxii.