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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/460

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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

le plus haut point où il soit parvenu ; et notre admiration doit le chercher d’abord au-dessous de ces invisibles grandeurs. Sa première étude de poésie, ses premières pensées, étaient celles de ses contemporains. Avec eux, à l’exemple des Provençaux, il faisait des sonnets subtils sur l’amour ; comme eux, il était raffiné et parfois bizarre. Il n’eut pas seulement un prédécesseur de son nom, auteur de quelques froids sonnets, et cependant admiré jusqu’à la passion par une jeune fille poëte, qui voulut se nommer la Nina di Dante : il crut, dans sa jeunesse, avoir quelques rivaux de poésie, et ne laissa que bien tard échapper l’aveu qu’il espérait les effacer tous, comme le peintre Cimabué surpassait Giotto.

Pardonnons à cette candeur du génie. Sa première forme était celle de son temps. Il avait, peut-être à un plus haut degré, les mêmes études de langue latine, de poésie provençale et de philosophie ; il composait une thèse sur la terre et l’eau considérées comme premiers éléments ; il était venu écouter dans Paris, rue du Fouarre, un grand maître de scolastique, et il avait lui-même discuté contre tout venant. Mais son génie parlait de plus haut. Dante, presqu’au sortir de l’enfance, a senti l’amour pur, vrai, profond ; il en a rendu les illusions et la douleur, avec une force qui rejette bien loin toute la poésie convenue et le langage affecté du siècle ; il en a gardé l’ineffaçable souvenir, comme un sceau de Dieu sur lui ; il a