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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/67

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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

Gardons-nous cependant de conclure que son génie nous échappe, et que Bossuet lui-même, en la célébrant, ait admiré des contresens. Malgré ce que l’exacte sagacité des modernes et leur subtile esthétique peuvent ajouter à l’intelligence du texte antique, ne croyons pas que ces Hellènes judaïsants du second ou du premier siècle avant notre ère, que les Septante, que plus tard un Origène d’Alexandrie, qu’un saint Jérôme, entre les docteurs de Bethléem, et les pieuses Romaines qui chantaient pour lui les psaumes dans la langue hébraïque, n’aient pas entendu ce texte que rendait avec tant de force une nouvelle diction grecque ou romaine. Faisons la part de ce qui est perdu, et celle de ce qui est immortel.

Oui, pour la poésie de David et pour tout le lyrisme hébraïque, encore plus que pour Pindare, si témérairement reconstruit de nos jours, la science moderne ne peut rien démontrer en ce qui touche la forme du mètre, l’exacte mesure des strophes, le mécanisme enfin et l’ensemble de la mélodie.

Mais telle était la force de beauté répandue dans l’original qu’elle se conserve pour nous, malgré cette ignorance des lois qui la régissent et de quelques-uns des charmes qui lui servaient à plaire. C’est ainsi que cette poésie sacrée des Hébreux, demi-voilée dans les obscures ellipses de sa langue antique, ignorée dans ses mètres, dépouillée de son harmonie, souvent transmise dans des versions informes ou faibles, n’en a pas